Demeter Geschäftsstelle | mars 2024

Michelle et Nathan Baumann exploitent l’Oswaldhof à Klarsreuti. Le jeune couple a délibérément opté pour une exploitation biodynamique.
« Aha, tu enterres des cornes ! », tel était le genre de commentaires que Nathan Baumann entendait lorsqu’il a repris l’Oswaldhof. L’agriculteur de 29 ans se souvient : » Mais pourquoi est-ce que nous enterrons des cornes, les gens ne le savaient pas. En fait, les gens ne savent que très peu de choses sur l’agriculture biodynamique ».
Durable et sans pesticides de synthèse
Nathan Baumann a un CFC d’agriculteur ; il a travaillé dans différentes exploitations pendant ses années d’apprentissage et de formation. Il se souvient : « J’ai aussi travaillé dans une exploitation conventionnelle intensive. C’est là que j’ai réalisé que ce n’était pas ma façon de pratiquer l’agriculture. La façon de lutter contre les insectes et les champignons, et même de les combattre pour pouvoir livrer des pommes conformes aux exigences des magasins, ne me plaisait pas ».
Michelle, son épouse, ajoute : « Nous travaillons de manière durable et avec ce que nous avons. Nous n’utilisons pas, par exemple, de produits chimiques de synthèse à pulvériser pour avoir encore plus de rendement ». Cette assistante socio-éducative diplômée s’imagine bien proposer à terme des places de time-out à la ferme pour des jeunes à besoins spécifiques.
La ferme doit continuer à se développer
Le jeune couple pratique l’élevage laitier et la culture sur une trentaine d’hectares. 500 arbres à haute tige fournissent des fruits pour le cidre doux, tandis qu’une trentaine de poules produisent des œufs. Michelle et Nathan Baumann vendent les quelque 210’000 litres de leur production laitière annuelle à la laiterie Biedermann de Bischofszell. Cette entreprise traditionnelle transforme le lait en produits Demeter de haute qualité, disponibles entre autres dans le commerce de détail.
A l’avenir, le couple de nouveaux locataires souhaite diversifier encore plus l’Oswaldhof. Davantage d’espèces animales devraient vivre sur l’exploitation. De plus, Michelle et Nathan veulent élargir la palette de produits de la ferme. Nathan Baumann : « Actuellement, nous avons un pilier principal, la production laitière. Il serait judicieux de développer d’autres activités. Je pense qu’il y a encore du potentiel, surtout en ce qui concerne la vente directe ».
En faisant le tour de la ferme, on remarque les énormes stocks de paille. Les ballots ronds sont empilés jusqu’au toit de la grange. Nathan Baumann explique : « Nous avons tellement besoin de paille que je dois même en acheter. Mes vaches ont toujours à disposition des couches de paille sèches qui sont rafraîchies quotidiennement. La paille produit ensuite du fumier, un aliment précieux pour nos prairies et nos champs. Le cycle est ainsi bouclé ».
Les animaux : un enrichissement
Les 45 vaches laitières sont traites, les dix veaux sont soignés. Nathan Baumann et sa femme Michelle (30 ans) font une petite pause dans la cuisine. Leur fille Emilia (3 ans) est à la crèche. Ils discutent de la suite des travaux de la journée. Michelle Baumann dit : « Ceux qui aiment faire la grasse matinée et prendre de longues vacances ne doivent pas reprendre une exploitation agricole. Les animaux représentent un grand engagement qu’il ne faut pas ressentir comme une charge, mais plutôt comme une source d’enrichissement ».
L’Oswaldhof à Klarsreuti, dans le canton de Thurgovie, a été l’une des toutes premières fermes bio. Elle est exploitée en permanence en biodynamie depuis 1930. Afin de protéger durablement la ferme de la spéculation du marché, celle-ci est devenue propriété de l’association Oswaldhof et ce, depuis 1966. Nathan et Michelle Baumann louent l’exploitation depuis janvier 2023.
Interview avec Michelle et Nathan Baumann
Vous avez repris la légendaire ferme Oswaldhof, cultivée en biodynamie depuis 1930. D’où tirez-vous l’assurance et la force nécessaires pour assumer cette tâche ?
Michelle Baumann (rit) : Nous sommes toutes les deux optimistes. Nous avons déjà traversé et vécu tant de choses ensemble que nous nous donnons mutuellement la force et la sécurité nécessaires.
Nathan Baumann : Quand je ne suis pas sûr de moi, je cherche de l’aide auprès de Michelle et inversement. Ensemble, nous sommes forts. Nous savons tous les deux que nous pouvons compter l’un sur l’autre les yeux fermés. Sans Michelle, je ne pourrais pas maîtriser tout cela.
MB : Cette confiance fondamentale nous a beaucoup aidés l’année dernière. Nous avons commencé notre première saison à l’Oswaldhof dans des conditions météorologiques extrêmement difficiles ; nous nous sommes donnés mutuellement beaucoup de force et de soutien.
Quelle est votre motivation pour produire en biodynamie ?
NB : Je viens à l’origine du secteur bio. Mais pendant un certain temps, j’ai aussi travaillé dans une exploitation conventionnelle intensive. C’est là que j’ai réalisé que ce n’était pas ma façon de faire de l’agriculture. La manière de lutter contre les insectes et les champignons, et même de les combattre pour pouvoir livrer des pommes conformes au magasin, ne me plaisait pas.
MB : Lorsque nous nous sommes mis à la recherche d’une ferme à louer, nous étions d’accord pour dire que le bio, c’était bien, mais que Demeter nous correspondrait encore mieux. La gestion durable selon l’idée d’un cycle nous convainc complétement.
Quelles sont les valeurs qui vous convainquent chez Demeter ?
NB : La gestion en circuit fermé est un thème important. Nous produisons au sein de notre propre exploitation les éléments nutritifs dont nous avons besoin pour que les plantes puissent s’épanouir. Ce sont nos préparations.
MB : Notre conviction est simple. Nous travaillons de manière durable et avec ce que nous avons. Nous n’avons pas recours à des produits chimiques de synthèse dans le seul but d’obtenir un rendement encore plus élevé. Cela entraînerait aussi des dépendances si l’on devait acheter des pesticides, des engrais et des micro-organismes. Dans l’agriculture biodynamique, on essaie de produire tout cela soi-même, si possible en petit cercle.
Certaines personnes de votre âge font le tour du monde, font la fête, profitent de week-ends oisifs. Cela ne vous manque-t-il pas ?
MB : Nous sommes contents de notre vie. Les fêtes ne nous manquent pas. Et les grandes vacances ne sont pas non plus une nécessité. Cependant, l’idée de pouvoir faire une vraie grasse matinée serait parfois bien agréable. Mais je sais très bien que je ne pourrais pas m’empêcher d’aller voir les vaches et de m’assurer qu’elles vont bien.
NB : J’aime aller à l’étable tous les matins. Je ne me réveille vraiment qu’une fois auprès des bêtes, lorsque je les trais.
MB : Ceux qui aiment faire la grasse matinée et prendre de longues vacances ne doivent pas reprendre une ferme. Les animaux nécessitent un grand engagement de notre part, engagement qu’il ne faut pas percevoir comme une charge, mais plutôt comme quelque chose d’enrichissant. Nous n’avons pas seulement notre petite fille Emilia, mais aussi 45 autres enfants dont nous prenons soin.
Venez-vous d’un milieu anthroposophe ?
NB : Non, mon intérêt pour l’anthroposophie est venu avec l’agriculture. Mais ma mère m’avait déjà appris qu’il y a des forces particulières, qu’il y a bien plus de choses sur la terre que ce que l’on voit. Mais cela n’avait rien à voir avec l’anthroposophie.
MB : Bien que nous ne soyons pas issus d’un milieu anthroposophe, nous n’avons jamais eu de réactions sceptiques ou négatives à ce sujet.
NB : Aha, tu enterres des cornes ! Certains le savaient. Mais ils ne savaient pas pourquoi nous le faisions. Les gens ne savent pas grand-chose de l’agriculture biodynamique. Que représente Demeter ? Qu’est-ce qui caractérise l’agriculture biodynamique ?
Où vous voyez-vous dans dix ans ?
NB : Nous voulons certainement avoir plus d’espèces animales sur l’exploitation, plus de diversité.
MB : Et nous voulons pouvoir proposer plus de produits.
NB : Actuellement, nous dépendons d’un gros acheteur qui achète tout notre lait. Il est donc logique de développer d’autres activités.
MB : A nos yeux, la ferme est aussi très polyvalente. Je suis assistante socio-éducative et je pourrais très bien m’imaginer que nous proposions des places de time-out pour des jeunes à la ferme, par exemple. Mais avant de pouvoir planifier cela, il faut que l’exploitation agricole roule correctement. Une chose après l’autre!
Interview: Patrick Schellenberg